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Neisson

L'œuvre répond à la commande de la ville du Diamant faite à l'artiste, d'un mémorial rendant hommage aux victimes d'un événement tragique survenu le 8 avril 1830 dans la baie de l'Anse Caffard. Commémorant une tragédie liée à la traite négrière et à l'esclavage, Cap 110 Mémoire et Fraternité, communément appelé Cap 110, fut inauguré le 22 mai 1998 à l'occasion du 150e anniversaire de l'abolition de l'esclavage. Implantée dans la commune du Diamant en Martinique, au lieu-dit Anse Caffard, cette œuvre monumentale est un ensemble de 15 statues identiques réalisées en béton armé et pesant chacune 4,5 tonnes. L'utilisation de gravillons et de sable blanc de Trinidad et Tobago dans la composition du béton leur confère un aspect blanchâtre.

D'aspect relativement lisse et sans détails, chaque statue représente la partie supérieure nue d'un corps masculin. Les têtes rentrées dans les épaules et les bustes, sont légèrement inclinés vers le bas. Les fondations de chaque statue enfouies dans le sol, au détriment de la présence d'un socle, laissent le spectateur imaginer des corps semi-enterrés à partir du bassin. Aux extrémités des bras maintenus le long du corps, leurs mains non visibles, semblent également figées dans la terre.

Parfaitement alignées en rangs serrés de 1 à 5, les 15 statues forment un triangle dont la pointe est orientée en direction du Golfe de Guinée, cap 110° Est, d'où le nom de l'œuvre.

« Dans la nuit du 8 au 9 avril 1830, un bateau de traite clandestine transportant un nombre inconnu de captifs africains s’est échoué sur les rochers de l’Anse Caffard, au nord de la ville du Diamant, avant d'être totalement détruit. M. Dizac, géreur de l’Habitation La Tournelle, qui reçut la nouvelle vers 23 heures, arrive à sauver quatre-vingt-six captifs (dont vingt-six hommes et soixante femmes*), grâce au travail des esclaves de son atelier. Le lendemain du naufrage, en plus de nombreux débris, quarante-six cadavres ont été retrouvés sur la côte, dont quarante-deux Noirs et quatre Blancs. Comme aucun homme blanc de l'équipage survécut, et qu'aucun document précisant le nom du bateau n'a été trouvé sur eux, l'identité du bâtiment reste inconnue à ce jour. Le rapport du directeur de l'Intérieur du 16 avril 1830 indique que les corps des marins négriers furent enterrés au cimetière, ceux des captifs du bateau “à quelque distance du rivage”. »
* Les hommes captifs étaient le plus souvent enchainés par paires à la cheville, tandis que les femmes n'étaient pas souvent enchainées sur le bateau, ce qui explique cette différence dans les chiffres.

Les terribles suites de ce naufrage, nous sont précisées dans un texte de Merlande Saturnin, historienne et membre de l'Association de sauvegarde du patrimoine du Diamant :
« “Il n'y eut que peu d'hommes sauvés étant tous accouplés avec des fers aux pieds et dans la cale au moment du naufrage.”
Dès lors un problème de droit se posait : que faire de ces êtres, qui, s'ils ne pouvaient être du fait de la loi d'alors, esclaves (puisque issus de la traite illégale) n'étaient pas considérés, ici dans cette colonie comme des hommes et donc ne pouvaient être réellement libres.
En mai 1830, le Conseil Privé de la Martinique déclare, que "l'envoi à Cayenne" (Guyane), des nègres capturés a été prescrit pour éviter d'avoir aux Antilles une classe spéciale d'individus qui, sans être esclaves en principe ne pouvaient être considérés comme libres… »

William J. Duiker, Jackson J. Spielvogel, The Essential World History, Volume II : Since 1500, Eighth Edition, 2015, p. 719 (texte en anglais)

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